XIXe-XXIe siècles
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Cet ouvrage collectif important rassemble des travaux issus des recherches récentes sur l’histoire du Crédit Lyonnais. Il comprend 41 contributions, divisées en cinq parties: l’entreprise Crédit Lyonnais en elle-même, à travers ses hommes, ses structures, ses métiers, ses relations sociales et conflits du travail; le financement de l’économie; l’internationalisation de la banque, des agences de l’Empire Ottoman et d’Egypte à celles de Londres et de Genève; les rapports du Crédit Lyonnais avec son environnement (concurrence, marché financier, Etat, presse); enfin les réactions de la banque face aux épreuves de l’histoire, avec notamment une étude pionnière sur une banque sous l’Occupation. Ce recueil restitue ainsi l’image d’une banque à la personnalité marquée et toutefois représentative du système bancaire français des années 1860 aux années 1980, en associant, dans un fécond mouvement entre histoire et mémoire, des articles d’universitaires à des témoignages d’anciens acteurs de la vie de l’établissement.
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Fictions de l’ipséité analyse les œuvres de Beckett, Hesse, Kafka, Musil, Proust et Woolf à la lumière de l’«autobiographie fictive» imaginée par Hesse: sous le masque des personnages inventés, ces auteurs remodèlent leur moi et recomposent leur vie en les transposant dans une représentation mythique de Soi. Par la mise en scène de situations extrêmes (exil, errance, échec, maladie, mort), par le recours à la figuration théâtrale, picturale et musicale, la fiction procure une représentation appropriée de ce Soi inventé, instance insaisissable et quasi divinisée de l’excès. Il fallait cette approche nouvelle d’œuvres majeures pour mettre en évidence la logique qui préside à la personnalité et aux aventures de leurs héros. L’indétermination, l’anonymat, les formes de rupture et de marginalité (fuite, folie, transgression, avilissement) récurrentes dans ces œuvres sont en effet interprétés comme l’attitude de soustraction et de négation, grâce à laquelle, paradoxalement, le héros – et à travers lui son auteur – s’érige en un Moi superlatif.
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Cette édition critique présente dans leur ordre chronologique tous les écrits politiques de Chateaubriand entre 1814 et la fin de 1816. Témoignages d’une époque politiquement très dense, reflétant les débats qui marquèrent la chute de Napoléon, la Première Restauration et le rétablissement de la monarchie, les Cent-Jours, puis les débuts de la Seconde Restauration, ils présagent la carrière politique d’un Chateaubriand destiné à devenir Ministre des Affaires étrangères ; ils récapitulent également la pensée d’un des promoteurs de la monarchie constitutionnelle ; ils expriment enfin la recherche d’une manière de dire et d’écrire la chose politique. Tour à tour journaliste, historien, polémiste, partisan de la liberté de la presse, catéchiste constitutionnel, à la fois conservateur et libéral, Chateaubriand enterre le vague des passions pour devenir homme d’action.
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L’art peut-il se soustraire à la question de la tyrannie ? La servitude volontaire résulte d’effets d’hypnose, elle procède d'un assoupissement de la vigilance du spectateur, entretenu par la croyance en l’image. Il incombe dès lors au philosophe d’en démonter le piège, de départir le plaisir de la représentation du leurre qu’elle produit. En posant le regard sur l’œuvre de Gustave Courbet, Pierre-Joseph Proudhon, l’anti-tyran, investit cette problématique, qui, d’emblée, est nécessairement celle du rapport au réel. Qu’est-ce qu’une ligne ? Peinture et écriture révèlent, dans leur entrelacement, dans la relation spéculaire de leur tracé, que l’enjeu de l’acte créateur est la liberté, question de vie et de mort. En ce sens, s’il a une destination sociale, l’art ressortit au politique et à la médecine. Ainsi semble-t-il indispensable de repérer l’imaginaire médical et de le définir en tant que moteur de la pensée esthétique de Proudhon. L’examen de la dépendance de l’art au public et à l’espace public peut-il échapper au discours oraculaire ? Comment décider de l’écart entre destin et destination ? Reprenant ce questionnement à la suite de Kant, Proudhon trouve dans le symbole qu’il appelle " plus ou moins mythique " la seule figure possible d’un avenir qui, dans sa plénitude, se dérobera inévitablement. A l’instar de Saturne, Proudhon tranche. En tranchant, il trace. En traçant, il tranche.
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Biographes comme admirateurs de l’écrivain genevois Rodolphe Töpffer (1799-1846) souhaitaient que sa correspondance fût éditée. Quiconque avait pu, en effet, consulter ses lettres déposées à la Bibliothèque publique et universitaire de Genève y retrouvait l’humour de l’auteur des Histoires en estampes – dont les héros sont, entre autres, Jabot, Crépin, Vieux-Bois et Festus –, le charme des Nouvelles genevoises, la spontanéité de l’écriture et des dessins des Voyages en zigzag.
Jacques Droin, ancien magistrat, président pendant deux décennies de la Société d’études töpffériennes de Genève, s’est attelé à la tâche de transcrire et d’annoter les quelque mille cinq cents lettres que nous a laissées Töpffer. L’édition qui en ressort fera connaître le caractère attachant d’un écrivain de la première moitié du XIXe siècle, qui fut à la fois professeur des traditions genevoises et chef de pensionnat, un dessinateur humoristique à l’origine d’un genre nouveau, auquel la bande dessinée est redevable, un critique d’art et l’initiateur de la peinture alpestre helvétique. Ce premier tome contient les lettres que Rodolphe échangea avec sa famille et avec ses proches durant son séjour parisien, au cours duquel il devait renoncer à sa vocation de peintre, héritée de son père Adam-Wolfgang Töpffer, en raison d’une faiblesse de la vue pour finalement embrasser la carrière de professeur.
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Des Illusions perdues à la naissance du cinéma, l’actrice occupe une place de choix dans l’imaginaire du XIXe siècle. Du réalisme au symbolisme, arts, lettres et poésie traduisent ce phénomène social qui trouve sa source dans la vie tapageuse des actrices et dans leurs Mémoires. Ces récits méritent d’être tirés de l’oubli, alors que bien des œuvres romanesques, en proposent des lectures interprétatives: personnage déterminé par le corps chez Zola, Edmond de Goncourt ou Champsaur, figure «idéelle» chez Villiers ou Rodenbach. Au début du XXe siècle, l’évolution est sensible: l’actrice perd en chair ce qu'elle gagne en signe; elle ne sera plus que le point de départ d’un itinéraire métaphorique ou spiritualiste. Ainsi renoue-t-elle, paradoxalement, avec des images fondatrices déjà suggérées par Nerval, Baudelaire ou Hugo. A la lumière des doubles que reflète et suscite l’actrice, cet essai s’interroge sur la fonction de son personnage dans le discours littéraire.
ire.
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